Christian Jacob : « L’union nationale ne se décrète pas »

S’il salue la réouverture des collèges et des lycées, le président du parti Les Républicains fustige l’absence de concertation avec les différents secteurs professionnels lors du reconfinement. Selon lui, la crise sanitaire « obligera vraisemblablement à décaler les élections » départementales et régionales prévues en mars de quelques mois.
Qu’auriez-vous fait de différent, aujourd’hui, pour endiguer la deuxième vague de Covid ?
Face à la circulation du virus , il fallait évidemment des mesures sanitaires très strictes. Mais on pouvait aujourd’hui éviter la désorganisation et l’incohérence dans lesquelles nous sommes. On est là sur un ratage complet du gouvernement : aucune anticipation, des annonces floues et ambiguës et sans aucune concertation. A tel point que le gouvernement est contraint à une session de rattrapage en annonçant qu’il va consacrer la semaine à rencontrer les différentes professions. Peut-être aurait-il été utile de le faire plus tôt, secteur par secteur.
On peut aussi trouver aujourd’hui des mesures beaucoup plus adaptées. Il faudrait renforcer les capacités hospitalières avec des hôpitaux éphémères, comme l’a fait le Royaume-Uni, ou davantage de personnel soignant, comme en Italie. Pourquoi ne pas mobiliser les médecins retraités, les étudiants en médecine, les médecins étrangers, ou encore créer un corps d’auxiliaires de santé pour brancarder, nourrir ou tenir compagnie… ? Les enseignements du printemps n’ont pas été tirés. Le résultat, c’est que l’Allemagne, qui a anticipé les choses sur les masques, les tests et les lits, compte 12 décès pour 100.000 habitants quand nous en avons 55.
Malgré les risques, fallait-il rouvrir les collèges et les lycées ?
C’était la bonne décision . D’abord parce que si on ne le fait pas, on oblige des parents à être à domicile. Ensuite parce qu’on ne peut pas saboter à ce point l’année scolaire. L’Education nationale doit pouvoir mettre en oeuvre des mesures strictes de distanciation et faire des classes hors des murs, en utilisant par exemple si nécessaire des salles qui ne peuvent plus être utilisées par des communes pour les manifestations culturelles.
Soutenez-vous les maires qui prennent des arrêtés pour ouvrir les commerces « non essentiels » ?
Désigner ces maires à la vindicte populaire est vraiment démagogique. Heureusement qu’ils ont été là, ils ont joué le rôle de lanceur d’alerte. Sinon, le gouvernement n’aurait pas mesuré le niveau d’impréparation qui a été le sien et le ratage du confinement, notamment sur les commerces du centre-ville. Il faut que les commerces de centre-ville puissent continuer à vivre, avec un protocole sanitaire bien précis.
Le gouvernement gère-t-il bien le volet économique de la crise ?
Pour avoir exercé des responsabilités ministérielles, je sais que l’art est difficile. Mais il y a encore des mesures à prendre, comme réduire la TVA pour l’hôtellerie-restauration, lancer un plan massif sur la rénovation énergétique plutôt que de s’entêter à dépenser des milliards avec les éoliennes, ou créer un fonds souverain qui additionnerait les fonds de la BPI et de l’Agence de participation de l’Etat pour proposer aux Français des produits financiers et mobiliser l’épargne sur les secteurs stratégiques. Aujourd’hui, 40 % des actions cotées françaises sont détenues par des non-résidents ; il faut réorienter notre épargne vers l’entreprise. Je regrette que les propositions que nous avions faites aient été repoussées d’un revers de main… La réalité, sur le plan économique, c’est aussi que l’on paye la note de trois ans d’inaction. Cela nous met en situation plus difficile pour réagir.
Parler d’« inaction » n’est-il pas caricatural ? Une partie de vos électeurs se retrouvent eux-mêmes dans l’action menée…
On commence à rentrer dans le temps du bilan. Et que voit-on ? Les dépenses publiques ont augmenté plus vite sous Macron que sous Hollande. La balance commerciale n’a cessé de se dégrader. La France est devenue le premier emprunteur mondial. Les comparaisons avec nos voisins ne sont pas à notre avantage. C’est une réalité.
Que dit de l’état du pays l’absence d’unité nationale, sur le Covid comme le terrorisme ?
L’union nationale ne se décrète pas. Ce n’est pas « je décide, j’ai raison et vous avez tort, point final ». Si on veut de l’union nationale, il faut accepter de se mettre autour de la table sur des propositions précises. Nous en avons fait. Face au terrorisme, la France n’est pas suffisamment armée. Depuis 2017, seuls sept lieux de culte ont été fermés, de manière temporaire sur la centaine tenue par des salafistes. Et contrairement à ce que dit le gouvernement, l’immigration est en partie le sujet. Depuis un mois, ce sont un Pakistanais, un Tchétchène , un Tunisien , un Afghan qui sont passés à l’acte ou ont tenté de le faire. On ne peut pas continuer avec une immigration totalement incontrôlée. Les demandeurs d’asile, qui baissent partout en Europe, ont augmenté de 55 % en trois ans en France.
En jouant la surenchère sur la sécurité et l’immigration, ne craignez-vous pas de faire le lit de Marine Le Pen ?
Ce n’est pas le sujet. Je me contrefiche des propositions de Marine Le Pen. La question, c’est comment on répond à une situation que des membres du gouvernement et le président de la République lui-même ont qualifiée de situation de guerre. Depuis 2015, nous avons déposé 37 propositions de loi, construites, sérieuses, précises. Elles n’ont jamais été retenues ni même entendues.
Eric Dupond-Moretti critique la « démagogie » et l’inconséquence » de vos propositions et de celles du RN. Que lui répondez-vous ?
Le ministre de la Justice a l’air très fier de ses déclarations mais ce qu’on lui demande, ce n’est pas de s’écouter parler. C’est d’être capable d’agir. Pour l’instant, il n’a rien démontré et, en matière carcérale, il est sur la même ligne que Madame Taubira.
Êtes-vous favorable à un report des élections régionales et départementales ?
Par principe, je suis pour le maintien des temps démocratiques. Mais la crise nous obligera vraisemblablement à décaler les élections . Si c’est le cas, elles doivent se tenir avant l’été. Il ne faut pas bloquer plus longtemps les décisions d’investissement sur les collèges, les lycées, et les routes, ainsi que la politique sociale et les aides économiques… La décision ne peut pas être le fait du prince, elle doit reposer sur des raisons objectives et donc consensuelles.
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Source: Actualités LR

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