Gérard Larcher : « Le président de la République a commis une faute »

Gérard Larcher, président du Sénat, condamne les propos tenus par Emmanuel Macron « en stigmatisant 5 millions de Français qui sont des citoyens à part entière ».
Comment avez-vous perçu les déclarations d’Emmanuel Macron publiées dans Le Parisien ? Il avait annoncé en décembre sur TF1 « avoir appris à aimer » les Français.
L’élection présidentielle est la clé de voûte de nos institutions. C’est le chef de l’État que nous allons élire au mois d’avril prochain. Doit-on accepter, et finalement se satisfaire, d’un tel abaissement du débat démocratique ? Emmanuel Macron ne peut sciemment utiliser la provocation pour hystériser le débat politique. La fonction présidentielle impose de la retenue et de la mesure. La campagne électorale doit obéir à quelques exigences indispensables aux enjeux de cette élection. Cette surenchère verbale n’est pas digne de la crise que vivent les Françaises et les Français depuis deux ans. Je dis au président de la République : votre fonction vous oblige, vous devez rassembler une nation archipélisée et profondément fracturée qui n’a nul besoin de crispations supplémentaires. Je dis au désormais candidat Macron : vous engagez mal votre campagne en stigmatisant 5 millions de Français qui sont des citoyens à part entière.
Emmanuel Macron a-t-il tendu un piège visant à créer des divisions à droite ? Et si oui, comment votre famille politique peut-elle éviter d’y tomber ?
Je pense qu’il a d’abord des problèmes avec sa majorité. Quand on dispose d’une large majorité à l’Assemblée nationale, on doit être en mesure de faire voter un texte considéré comme majeur pour le gouvernement. Les polémiques, les artifices de communication ne peuvent masquer la réalité des faits. J’ai dit, comme une large majorité des sénateurs, que nous voterions le passe vaccinal sous réserve d’ajustements, comme nous l’avions fait pour le passe sanitaire. En effet, le recours à de tels dispositifs réducteurs de libertés ne peut se faire sans contrôle et sans limitation dans le temps. C’est le rôle du Sénat d’y veiller. Les provocations de dernières minutes ne doivent pas nous détourner de notre seule boussole : l’intérêt de la France et la protection des Français. Je laisse la majorité à ses crises de croissance. Je propose à tous les acteurs de cette campagne électorale de retrouver le calme.
Quand la France, lassée par le Covid, enregistre près de 90 % de vaccinés, n’est-ce pas un pari politique gagnant pour celui qui le tente ?
Je n’ose pas imaginer que nous puissions faire un « pari politique » quand il s’agit de la situation sanitaire du pays. Je demande à Emmanuel Macron de ne pas confisquer le débat de l’élection présidentielle par des provocations inutiles destinées à caricaturer la droite, à masquer l’inconsistance de sa majorité et la faiblesse de son bilan.
Cette stratégie vous semble-t-elle concertée avec le premier ministre ?
En tout cas, elle est pensée à l’Élysée.
Ces commentaires présidentiels ont-ils été lâchés sciemment, selon vous, en plein débat parlementaire sur le passe vaccinal ?
Cette interview est pensée, pesée et assumée. Il ne peut donc y avoir aucune ambiguïté, elle s’inscrit dans la stratégie de campagne du candidat à la présidence de la République.
Quelles sont les lignes rouges du Sénat concernant le projet de loi du gouvernement ?
Du fait des défaillances de la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale, nous ne pourrons examiner le texte que lundi en commission et mardi en séance. Je souhaite que le Sénat vote ce texte amendé. Certaines dispositions devront être revues. Les rapporteurs, Philippe Bas et Chantal Deseyne demandent notamment que le passe vaccinal tombe automatiquement quand un certain nombre de conditions seront réunies par exemple sur le niveau des hospitalisations ou la circulation du virus. La question du contrôle d’identité sera débattue et, enfin, donner à l’Inspection du travail l’appréciation d’un emploi télétravaillable est inapproprié.
Avez-vous l’impression qu’Emmanuel Macron joue avec le Parlement ?
J’ai souvent dénoncé la verticalité de ce pouvoir et la tentation permanente qu’il a de contourner le Parlement. Il suffit de noter le nombre exorbitant d’ordonnances qui privent le Parlement du débat au fond. Certains ont eu tendance à oublier que nous étions dans un régime parlementaire et que c’est le Parlement qui vote la loi.
La présence du drapeau européen sous l’Arc de triomphe avait suscité de vives réactions. Que répondez-vous au président qui les a jugées « disproportionnées » et laissé entendre que certaines personnalités comme Valérie Pécresse avaient « oublié » d’où elles venaient ?
Le président de la République a commis une faute. Sous l’Arc de triomphe doivent flotter ensemble le drapeau tricolore et le drapeau européen, car nous célébrons la présidence française de l’Union européenne. Si je suis profondément européen, je crois que nous formons une nation, qui ne peut être dissoute dans une Europe fédérale. Je me retrouve dans cette phrase de Simone Veil : « J’aime la France, je fais le choix de l’Europe. »
Peut-on comparer le candidat « Macron 2017 » avec le candidat « Macron 2022 » ? Comment la droite peut-elle lui répondre ?
Non. Dans l’intervalle il y a eu un quinquennat. Il va lui être difficile de nous présenter un projet quand il va déjà lui falloir inventer un bilan. Emmanuel Macron a beaucoup promis mais a peu fait. Son quinquennat est un échec, la campagne va le démontrer.
Valérie Pécresse promet d’installer le « respect », « l’autorité » et la « dignité » au cœur de son projet… mais veut ressortir le « Karcher de la cave ». En quoi ce message susciterait-il une adhésion majoritaire dans le pays à la présidentielle ?
Nous avons trop souvent reculé, c’est la raison de nos échecs, c’est la raison de la poussée de la droite radicale. Nous avons retenu la leçon. En matière de sécurité notamment, les limites de l’acceptable sont aujourd’hui largement dépassées. Ce quinquennat n’a rien réglé. Le refus de l’autorité et les violences qui en découlent, la multiplication des zones de non-droit, la montée des communautarismes, l’incapacité des pouvoirs successifs à trouver des solutions à l’immigration incontrôlée, ont fini par détourner les Français de la parole publique et ceux-ci ont trouvé refuge dans l’abstention ou le vote extrême. C’est une voie sans issue. Il faut changer radicalement de politique. C’est le sens, il me semble, de « la parabole du Karcher » utilisée par Valérie Pécresse. Elle seule peut gagner face à Emmanuel Macron par la cohérence de son projet et au fond, les Français n’éliront pas un président ou une présidente de la droite radicale.
>> Lire l’interview sur LeFigaro.fr
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Source: Actualités LR

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