Bruno Retailleau : « Macron a ajouté la discorde au désordre »

Bruno Retailleau, président des sénateurs Les Républicains, dresse son propre bilan du quinquennat. Celui qui doit préparer les 100 premiers jours de la présidence en cas de victoire de Valérie Pécresse estime que « les vantardises de Macron ne correspondent pas à la réalité ».
Alors qu’à trois mois du premier tour de la présidentielle , Valérie Pécresse voit le souffle du congrès retomber, la stratégie est explicite à droite : « installer le duel Pécresse/Macron » dans l’esprit des Français. Dans un entretien au JDD, Bruno Retailleau dresse, document d’une quarantaine de pages à l’appui, un bilan « médiocre du quinquennat ». « Voilà un homme qui promettait de tout changer, et qui n’a rien réformé », charge celui qui doit préparer les 100 premiers jours de la présidence de Valérie Pécresse.
Insécurité, finances, éducation… Le patron des sénateurs LR n’épargne rien sur le fond et s’en prend aussi, sur la forme, à sa « pratique du pouvoir » : « Il a élargi les fractures françaises. Du « mâle blanc » à ceux qui « ne sont rien », il n’a cessé d’hystériser, de blesser, de diviser. Il fustige les populismes, mais pratique une sorte de trumpisme chic. »
Dans un document, vous dressez le bilan du quinquennat d’Emmanuel Macron . Comment le résumeriez-vous ?
Il est médiocre. Emmanuel Macron a ajouté la discorde au désordre, et son échec est autant celui d’une politique que d’une pratique du pouvoir. À longueur d’émissions, il ne tarit pas d’éloges sur lui-même, et demande à être jugé sur ses résultats. Nous avons donc voulu le prendre au mot, en jugeant ses actes à l’aune de ses promesses. Emmanuel Macron ambitionnait de créer un « nouveau monde ». Il annonçait une « révolution ». In fine, il n’a même pas réformé les retraites, qu’il qualifiait lui-même de « mère des réformes ».
Quel est son principal échec à vos yeux ?
Voilà un homme qui promettait de tout changer, et qui n’a rien réformé. Où est la révolution pénale ? L’insécurité n’a jamais été aussi forte. L’immigration n’a cessé d’augmenter. Où est la révolution éducative ? Jamais les résultats n’ont été aussi mauvais dans les classements internationaux et la réforme du bac aggrave encore plus nos faiblesses, comme en mathématiques. Où est la révolution budgétaire ? Les comptes publics n’ont jamais été autant dans le rouge. Car ce jeune président a de vieux réflexes : à chaque problème, une dépense supplémentaire. Résultat : des déficits abyssaux. Budgétaires bien sûr, mais aussi commerciaux, signe que la France a perdu en compétitivité. Il avait aussi promis de réconcilier les Français. En réalité, il a élargi les fractures françaises. Du « mâle blanc » à ceux qui « ne sont rien », il n’a cessé d’hystériser, de blesser, de diviser. Il fustige les populismes, mais pratique une sorte de trumpisme chic.
Peut-on parler d’échec quand la croissance va être de 6% cette année, et que le chômage est tombé à 8%, au plus bas depuis treize ans ?
Ces 6% ne sont que le rattrapage mécanique d’une récession qui, dans notre pays, a été particulièrement forte. Et si le taux de chômage est bien à 8%, il est moitié moindre en Allemagne. Dans ce domaine comme dans d’autres, la France est à la traîne de l’Europe. Les vantardises d’Emmanuel Macron ne correspondent pas à la réalité.
Vous dénoncez la hausse des dépenses publiques et l’explosion de la dette. Faut-il en déduire que la victoire de la droite annoncerait le retour de l’austérité ?
Non, ce sera le retour de l’efficacité. Parce que le drame français, c’est que nous sommes les champions toutes catégories de la dépense publique alors que nos trois grands services publics ne remplissent plus leurs missions : la santé, la sécurité et l’éducation. Dans ces domaines, Emmanuel Macron n’a jamais traité les causes, il s’est contenté d’en atténuer les effets avec toujours plus de dépenses publiques. Valérie Pécresse , elle, augmentera les emplois dans les fonctions qui protègent, éduquent et soignent. Mais elle mènera aussi les réformes nécessaires pour rendre nos services publics efficaces. Parce qu’aujourd’hui les Français n’en ont pas pour leur argent. Le problème français n’est pas tant la dépense que la performance de la dépense.
Selon LREM, un travailleur au smic gagne aujourd’hui 170 euros de plus par mois, soit l’équivalent d’un treizième mois sur un an. C’est un résultat que vous saluez ?
Les primes, tant mieux pour ceux qui les touchent, mais on ne bâtit pas la prospérité d’un pays sur des chèques en bois. Depuis l’été dernier, nous en sommes à près de 30 milliards d’euros de promesses. Emmanuel Macron achète sa réélection sur le dos des futures générations. Les chèques d’aujourd’hui sont les impôts de demain. Avec la hausse de l’inflation, qui n’est pas passagère, comme le prétend Bruno Le Maire, mais va devenir structurelle, à près de 3% par an, le pouvoir d’achat des Français sera rogné si les réformes courageuses sont une fois de plus repoussées.
N’y a-t-il pas, tout de même, quelque chose de positif dans l’action de Macron depuis cinq ans ?
Tout n’est jamais mauvais, bien sûr. Il y a eu la réforme de la fiscalité des entreprises, et celle, quoique timide, de l’assurance chômage. Après tout, François Hollande lui-même avait restitué aux entreprises pour 40 milliards d’euros de charges et réalisé une réforme des retraites. Des mesures dont son successeur a bénéficié, d’ailleurs.
Est-ce qu’au fond, ce que vous reprochez le plus à Macron, ce n’est pas sa pratique du pouvoir, plus que ses actes ?
Emmanuel Macron, c’est l’échec du « en même temps » : une politique qui promet tout et ne mène à rien ; qui peut dire blanc un jour et noir le lendemain ; qui peut annoncer la fermeture de 14 centrales nucléaires en 2018 et décider d’en construire de nouvelles aujourd’hui. C’est le règne du faux. Un jour, la larme à l’œil, Emmanuel Macron regrette d’avoir blessé des Français. Le lendemain, il stigmatise une partie d’entre eux et instrumentalise la lutte contre le virus, parce que les petits calculs du candidat ont pris le pas sur les devoirs du chef de l’État. Ce cynisme est aussi le produit de son égocentrisme. Emmanuel Macron a commencé son quinquennat en Jupiter, il le termine en Narcisse. La France n’est que le miroir dans lequel il s’admire.
Les députés LR se sont divisés sur le passe vaccinal. Quid des sénateurs, qui l’examineront cette semaine ?
Nous voterons le passe vaccinal, comme nous avions voté le passe sanitaire. Nous ferons évidemment notre travail de parlementaires. Parce qu’on ne peut pas s’habituer à vivre dans une société du contrôle permanent, nous voulons notamment prévoir un système de péremption du passe vaccinal, quand la situation sanitaire se sera améliorée. Mais le Sénat ne tombera pas dans le piège que lui tend Emmanuel Macron, qui veut se poser en seul protecteur des Français.
Valérie Pécresse vous a chargé de préparer les 100 premiers jours de son quinquennat. N’est-ce pas un rôle de futur Premier ministre ?
[Il sourit] Vu l’état dans lequel Emmanuel Macron va nous laisser le pays, nous devons nous préparer méticuleusement à l’exercice du pouvoir, autrement plus difficile que sa conquête. Il faut que, le jour venu, Valérie Pécresse dispose déjà d’une feuille de route aussi claire que précise, avec les textes de loi correspondants, pour réformer la France et tenir les engagements qu’elle aura pris devant les Français. C’est ce à quoi nous nous attelons.
>> Lire l’interview sur LeJDD.fr
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Source: Actualités LR

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