Bruno Retailleau : « Emmanuel Macron, c’est 2 millions d’immigrés en plus »

Alors que le projet de loi « séparatismes » arrive au Sénat, Bruno Retailleau s’indigne d’un président de la République incapable de juguler l’immigration et de favoriser l’assimilation. Le président du groupe LR au Sénat décrit le régalien comme « l’angle mort du macronisme », et prédit une élection 2022 à haut risque pour le chef de l’État.
Le projet de loi du gouvernement sur le séparatisme arrive au Sénat. Comment faut-il le comprendre ?
On attend le dernier moment pour se pencher sur un problème crucial. Emmanuel Macron n’a pas pu ne pas s’apercevoir de l’urgence à combattre l’islamisme : les attentats ont commencé avec Mohammed Merah en 2012, puis se sont accélérés avec Charlie Hebdo et le Bataclan en 2015 ! À l’époque, il est à l’Élysée, proche de François Hollande,puis ministre avant d’arriver à la tête de l’Élysée…
C’est d’autant plus grave que cette loi manque sa cible, puisqu’elle n’ose pas nommer les choses. On voit bien la protestation des autres cultes qui ne posent aucun problème à la République. Mais puisque cette loi ne nomme pas ce qu’elle prétend combattre, qu’elle ne cible pas ce fléau qu’est l’islamisme, tout le monde en prend pour son grade de manière injuste.
Il y a enfin un manque évident dans ce texte : la question de l’immigration.
Pourquoi devrait-elle selon vous y figurer ?
Parce que nous avons renoncé à l’assimilation, parce que nous ne régulons pas les flux migratoires, parce que le pouvoir — avant même Emmanuel Macron — s’est refusé à contrôler l’immigration qui dans bien des quartiers, sur bien des territoires, s’est constituée en contre-société.
Les flux migratoires échappent désormais à tout contrôle. Emmanuel Macron est d’ailleurs le seul chef d’État, en Europe, qui semble ne pas avoir pris la mesure du problème. Les flux sont désormais supérieurs à toutes nos capacités d’accueil. Résultat, nous avons beaucoup trop de personnes qui arrivent avec leurs cultures et qui refusent toute assimilation. Je parle d’assimilation et non d’intégration, car les deux ne sont pas sur le même plan. S’intégrer relève de la vie économique et sociale; s’assimiler s’inscrit dans une dimension civilisationnelle. La liberté de conscience, l’égalité des sexes, la fraternité française : ces exigences sont des éléments de civilisation.
Disons les choses : c’est parce que notre machine à assimiler est grippée et que les flux migratoires sont ininterrompus que l’islamisme a pu se développer. L’immigration incontrôlée a servi de terreau au djihadisme d’atmosphère. Comment s’étonner qu’aujourd’hui des territoires entiers échappent à la République ?
Que devrait faire Emmanuel Macron ?
Quasiment tous les pays d’Europe ont durci leurs conditions d’accueil. La France a fait l’inverse. En Allemagne, par exemple, il existe un accord depuis le 1er août 2018 qui limite le regroupement familial. Il me semble pourtant que nous vivons sous le même empire de la même Cour européenne des droits de l’homme ! Au contraire, nous avons permis, par la loi asile et immigration de MM. Macron et Collomb, d’étendre le regroupement familial aux frères et soeurs des mineurs isolés. Nous permettons par ailleurs le regroupement familial pour un conjoint sans délai, sans condition de ressources, sans condition de logement. Beaucoup de pays freinent : nous accélérons. Résultat : la France est le pays le plus accueillant d’Europe et les filières mafieuses de passeurs l’ont parfaitement compris.
Vous avez évoqué la CEDH. Nous pourrions aussi relever l’inefficacité de notre politique d’expulsion ou le canal d’immigration creusé par les mineurs étrangers… Par quoi commenceriez-vous pour mettre un terme à ces dysfonctionnements ?
Au Sénat, Gérard Collomb, alors ministre de l’intérieur, avait reconnu que « les migrants font un peu de benchmarking pour regarder les législations les plus fragiles ». Aujourd’hui, la France est le pays d’Europe le plus généreux pour le droit d’asile, l’accès gratuit aux soins, le regroupement familial ou encore la naturalisation. La priorité, c’est de renverser la table pour adresser le signal aux passeurs qu’en France, ce n’est plus “open bar” !
Le Rassemblement national parle depuis longtemps du concept de préférence nationale. Le terme est devenu explosif, mais, dans l’esprit, faut-il favoriser les Français en ce qui concerne l’accès à l’emploi, les allocations, les aides… ?
Il faut assumer que ce soit la cotisation qui déclenche la prestation. À partir du moment où quelqu’un est intégré, en situation régulière, respecte la loi et participe à la richesse nationale en cotisant, il peut évidemment bénéficier des aides de l’État. Mais le modèle social français, particulièrement généreux, ne peut être en accès libre. C’est la condition de sa survie. Il faut par ailleurs réduire les naturalisations en réactivant la disposition qui permettait avant 1993 de s’opposer par décret à la naturalisation pour défaut d’assimilation.
Est-ce que vous diriez, d’un point de vue statistique, qu’Emmanuel Macron est un président immigrationniste ?
Bien sûr. Sous sa présidence, la France a battu des records : Emmanuel Macron, c’est 2 millions de personnes immigrées en plus.
Si le lien entre immigration et terrorisme semble compris, celui entre immigration et insécurité peine encore à être admis. Faites-vous ce lien ?
Évidemment. Regardez l’exemple des mineurs isolés : le parquet de Paris lui-même a relevé que 75% des mineurs jugés l’an dernier étaient des mineurs étrangers. Le lien est évident.
Du reste, nous savons qu’une partie d’entre eux sont des faux mineurs. Je propose que le refus de se prêter à un test osseux constitue une présomption de majorité, afin d’expulser les faux mineurs isolés. Prenez encore l’agression d’un photographe reimois par un Algérien en situation irrégulière, huit fois condamné. Souvenez-vous des rixes entre bandes maghrébines et tchétchènes à Dijon l’été dernier. Allons plus loin : qui s’est chargé de faire appliquer la loi dans cette affaire ? En l’occurrence, les juges de paix ont été deux imams, venus de chaque communauté. Ce ne fut ni la mairie ni le commissariat. Et combien d’expulsions ont été effectives à la suite de ces violences ? Il faut réécrire le droit des étrangers, pour faciliter les expulsions. La Cour des comptes elle-même avait indiqué que « le nombre d’éloignements se heurte à des impasses de procédure ». On devait déjà beaucoup à François Hollande et Manuel Valls, mais tout s’est aggravé avec Emmanuel Macron sur ces sujets.
Il y a une question sans doute plus délicate que celle des nouveaux flux : celle des personnes d’origine étrangère qui tiennent un discours, adoptent un comportement ou professent des valeurs très différentes de celles de la France… Est-ce soluble ?
En France, on a longtemps refusé de transmettre des valeurs, à commencer par l’amour de la France. Jean-Pierre Chevènement le dit parfaitement d’ailleurs : il faut aller au-delà de l’attachement à la République, qui n’est qu’un régime de gouvernement. Comme la laïcité, la République ne peut pas à elle seule créer un attachement suffisant. Je cite Chevènement à dessein, parce qu’il est issu de cette gauche républicaine que je respecte.
Comment des jeunes nés de l’immigration peuvent-ils s’identifier à un pays qui bat sa coulpe en permanence et criminalise son histoire ? Lorsque vous désignez la France comme éternellement coupable, comme un antimodèle, comment s’étonner ensuite que cette jeunesse la juge peu attirante ? Ce discours victimaire la pousse à se percevoir comme un peuple à part. Et Emmanuel Macron souffle sur ces braises. Il avait commencé pendant sa campagne en accusant la France de crime contre l’humanité lors de la colonisation. Et il persiste en désignant l’historien Pascal Blanchard à la tête du comité chargé de proposer des noms issus de la diversité afin de nommer des rues ou des places. Or Pascal Blanchard est un marchand de mémoire, un militant du décolonialisme et lors des polémiques récentes, il a fait le parallèle douteux entre « l’islamo-gauchisme » et le « judéomaçonisme » utilisé dans les années 1930. En oubliant au passage que la source principale de l’antisémitisme aujourd’hui, c’est l’islamisme ! Cette disposition des élites à l’autoflagellation, à la “disqualification radicale”, pour reprendre les mots de Pierre Nora, est terrible.
En voulez-vous à Gérald Darmanin d’avoir déposé une gerbe à Alger sur un monument célébrant les soldats du FLN ?
Ce n’est pas ce que les Français demandent à un ministre du gouvernement de la République. C’est aussi cautionner la stratégie d’un régime algérien qui depuis des années a appauvri son peuple et qui nourrit une haine mémorielle contre la France, pour masquer ses propres échecs.
Est-ce que Gérald Darmanin est un bon ministre de l’intérieur ?
Non, parce que les résultats sont mauvais. Aujourd’hui, tous les voyants sont au rouge : les rixes entre les bandes ont augmenté de 24%, les homicides et tentatives d’homicide de 15% et la délinquance s’impose désormais en milieu rural. Chaque jour, nous assistons impuissants à la chronique ordinaire d’une barbarie quotidienne. Pour y mettre fin, il faudra faire une révolution pénale. Cela ne servira à rien d’avoir un peu plus de policiers si les juges remettent en liberté les délinquants ! Pour que la peur change de camp, il faudra changer la loi. Je propose un principe simple : une infraction doit être sanctionnée par une peine et la peine exécutée.
Pour les mineurs, il faut pouvoir proposer de courtes peines de prison dans des établissements spécialisés pour leur faire prendre conscience de leurs actes. Je suis par ailleurs pour la responsabilité des magistrats et contre leur syndicalisation. L’angle mort du macronisme, c’est le régalien. Sa présidence aura été marquée par le désordre parce que le progressisme est un angélisme, bon pour un monde de Bisounours. Il perd le sens du tragique. En matière d’insécurité, d’immigration ou d’islamisme, le bilan d’Emmanuel Macron sera mauvais. Ces thèmes seront au coeur de la prochaine élection présidentielle, et c’est pour cela qu’Emmanuel Macron aura du mal à franchir le premier tour.
Quelle est selon vous sa faute première ?
Sa faute originelle, c’est Notre-Dame-des-Landes. Quand il donne raison aux opposants, contre 180 décisions de justice et contre le résultat d’une consultation populaire, il enclenche une mécanique destructrice. À partir de là, il ruine toute possibilité d’autorité.
Pour 2022, tous les candidats de droite auront-ils les mêmes préoccupations que vous sur ce sujet ?
S’adresser à la France populaire, c’est d’abord répondre à son angoisse identitaire. Bien sûr, la question du pouvoir d’achat est essentielle et nous devons y apporter des réponses fortes et crédibles. Mais ma conviction, c’est que la seule promesse d’amélioration des conditions matérielles de nos existences ne peut suffire. La France est devenue un archipel fragmenté. Pour faire d’une population archipellisée à nouveau un peuple, une nation, il faudra parler des conditions immatérielles sans lesquelles il n’y aura pas de relèvement. Les Français sont attachés à leur niveau de vie, mais plus encore à leur mode de vie. Ils ne veulent pas se sentir étrangers chez eux. Ils veulent qu’on leur reparle de la France qu’ils aiment. Deux mille vingt-deux n’échappera pas à cette question de l’identité qui taraude nos démocraties.
L’identité, c’était déjà le thème de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. Pourquoi faire confiance à votre famille politique ?
Je comprends les doutes de nos électeurs : la droite n’a pas tout mal fait, mais c’est vrai qu’elle n’a pas été au bout de ce qu’elle avait promis, qu’il s’agisse de la dépense publique, de l’immigration ou du travail. Simplement, je ne me sens comptable de rien. Je n’ai fait partie d’aucun gouvernement. Nous devons, nous aussi, faire un inventaire. Ma famille politique doit sortir des demi-mesures. J’assume dans mon projet une certaine radicalité car la France est radicalement en danger.
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Source: Actualités LR

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